[Livre I

Il avait reçu de bon matin un petit mail lui disant que le livre était terminé. Le message provenait de Kate, il lui répondit rapidement, qu’il était disponible n’importe quand aujourd’hui et qu’elle choisisse l’horaire qu’elle souhaitait pour « échanger » le bouquin à la bibliothèque. Comme ça elle pourrait probablement trouver un moment entre son boulot de… il ne savait plus quoi, et ses révisions. En attendant, il s’était remis à regarder la télé avachi dans le canapé, tout en grignotant des chips. Ce n’était ni glamour, ni diététique, mais il avait envie de profiter d’avoir le canapé pour lui tout seul, et de ne pas entendre sa jumelle trop parler pour ne rien dire. C’est fou ce qu’elle pouvait parfois sortir comme mots à la minute, lui était quand même beaucoup plus réservé et ne savait pas tout le temps quoi répondre, et avait bien du mal à comprendre pourquoi sa sœur était si curieuse et pourquoi la vie des autres semblait parfois l’intéresser ! C’est vrai c’était généralement ennuyeux tous ces blablas inutiles, à part de rares cas, à quelque chose près les journées, les plaintes, les ragots et compagnie se ressemblaient tous. C’était probablement un truc de femme de parler autant, même s’il avait déjà croisé des hommes aussi bavards que la gente féminine. Tim’ soupira doucement en songeant qu’il allait devoir peut-être dialoguer avec Kate. Qu’est-ce qu’il allait bien pouvoir lui sortir à par un « merci ? », un « bonjour » et ce genre de choses totalement banales ?! Avec un peu de chance après ces quelques mots prononcés, il pourrait se tailler sans rien rajouter… Non, Kate lui semblait gentille et il fallait qu’il devienne un peu plus causant, ce n’était pas possible d’avoir du mal à aligner deux mots, alors il fallait qu’il fasse un effort avec quelqu’un comme elle qui ne semblait pas le juger au premier abord. Il passa l’heure à essayer de trouver des sujets de conversations intéressants, mais au final rien ne lui venait, il les trouvait soit nul, soit, cela faisait trop préparé. A ce rythme-là, il n’allait pas franchement avancer ! Tapotant ses doigts sur le canapé, il eut finalement une idée et alla prendre une clé usb ainsi que son ordinateur. Il chercha rapidement dans ses dossiers deux ou trois pdf et les chargea sur la dite clef ! Voilà, il avait peut-être un début de sujet de conversation, s’il osait lui donner la clé….

A l’heure du rendez-vous, il attendait donc la jeune femme devant la bibliothèque, ça serait ainsi plus pratique pour se retrouver. Il n’y avait plus qu’à espérer qu’elle ne soit pas en retard. Les mains dans les poches pour éviter de trop se passer les mains dans les cheveux de stress, car oui l’attente était quelque chose qui le stressait, il essayait de répéter dans sa tête la façon dont il pourrait l’aborder, lui parler tout en restant naturel. Et ce n’était toujours pas au point, c’était même rien de le dire ! Enfin, il aperçut la silhouette de la jeune femme, il se retint tout juste à regarder sa montre pour vérifier si elle était à l’heure ou pas, cela pourrait paraitre quand même assez grossier !

- Bonjour Kate. Ca va bien ? dit-il d’une voix assez lente, comme s’il cherchait les mots les plus adéquats, comme s’il voulait vérifier que ce qui sortait de sa bouche était correct ou pas …

11 Janvier 2050

Il était neuf heures, cela faisait deux heures que Kate était officiellement réveillée et qu’elle travaillait. Elle n’avait toujours pas de nouvelles de sa mère adoptive et ça la rongeait profondément. Cela faisait deux nuits qu’elle n’était pas rentrée, la brune s’inquiétait de plus de plus. Alors qu’elle décrochait de son travail pour se morfondre, son regard s’égara jusqu’à un livre en particulier « Police Scientifique, les experts au cœur de la scène de crime ». Ne travaillant pas la veille au soir, la jeune femme s’était plongée dans ses études jusqu’à s’écrouler d’épuisement sur le bureau. Elle en avait oublié le fait qu’elle avait terminé d’utiliser le bouquin. Kate s’empressa de se saisir de son téléphone pour envoyer un e-mail au fameux Tim de la bibliothèque qui lui avait bien sauvé la mise en lui laissant l’ouvrage.

« Bonjour Tim. J’ai terminé le livre donc si cela vous convient je vous donne rendez-vous à 11 heures ce matin à la bibliothèque. Encore merci de m’avoir laissé ce livre en premier. A tout à l’heure. »

La jeune femme se leva de sa chaise, elle avait besoin d’une bonne douche bien froide pour détendre son corps tout entier. Plus le temps passé et plus le stress et l’angoisse dégradaient la condition physique de la brune. Elle-même le ressentait et cela lui faisait peur. Elle ne s’était accrochée à absolument personne dans sa vie jusqu’à Fallon. En même temps, pas un lui avait donné rien qu’une bonne raison de donner sa confiance. Mais l’africaine avait tout fait dans les règles de l’art, pour leur milieu. Elle lui avait donné sa parole, mais surtout, elle l’avait tenu, et sans une seule hésitation. Et aujourd’hui Kate la remerciait en la provoquant sur un sujet qu’elle savait sensible chez sa mère adoptive. Certes, elle ne l’avait pas fait dans ce but mais plus par honnêtement et pour la protéger. Le résultat avait été tout autre bien sûr.

La douche froide voir glaciale lui changea les idées. Lorsqu’elle en sortit, la brune constata que son cocard était encore présent et plutôt bien visible. Elle s’appliqua donc à mettre du fond de teint pour paraitre le plus naturel possible tout en camouflant les traces de bleus. La jeune femme rajouta un coup de mascara avant d’aller s’habiller. Elle prit un tee-shirt manches longues, un jean et une veste à capuche, elle voulait être dans une tenue confortable qui pourrait lui permettre potentiellement d’éloigner tous ceux dont elle ne souhaitait pas la présence. Elle prit son sac en bandoulière où elle glissa le livre concerné, il serait vraiment bête de l’oublier, et se mit en route. La marche à pied lui faisait du bien, les écouteurs dans les oreilles, la jeune fille écoutait beaucoup de chansons mélancoliques. L’absence de sa mère qui était si chère à son cœur était pesante, même pire, déchirante.

Kate arriva à la bibliothèque avec dix bonnes minutes d’avance. Elle aperçut Tim devant le bâtiment ce qui la poussa à vérifier l’heure. Non la jeune femme était bien en avance, pour autant elle faisait tout de même attendre ce gentil garçon qui lui avait rendu service. S’approchant du brun, elle lui tendit la main tandis que ce dernier la salua. Elle fut surprise par son comportement. Une chose avait changé mais elle n’arrivait pas encore à mettre le doigt dessus. Elle espérait toutefois que c’était quelque chose de positif. Une fois qu’ils se serrèrent la main elle lui répondit.

Bonjour Tim. Ça va très bien et vous ?

Une fois que les premières politesses furent finies, Kate lui fit signe de la suivre. Elle pénétra à l’intérieur du bâtiment et se dirigea auprès de la personne responsable de l’accueil. Cette dernière était au téléphone aussi la brune s’arrêta à quelques mètres du bureau afin de ne pas la déranger. Elle en profita pour vérifier que Tim était bien avec elle et lui adressa un petit sourire qui se voulait rassurant. Dès que la responsable eut raccrochée, la brune s’avança.

Bonjour madame, je souhaitais vous rendre ce livre. Ce jeune homme compte l’emprunter à son tour étant donné qu’il m’a gentiment laissé l’avoir en premier il y a quelques jours de cela.

Les règles de la bibliothèque stipulaient qu’un emprunt était possible qu’une fois que le livre avait été remis dans les rayons. Mais Kate était venue de nombreuses fois ici ces dernières années au point de sympathiser avec le personnel récurrent. Aussi la femme assise derrière son bureau lui fit un grand sourire tout en lui répondant :

Je peux bien vous rendre ce petit service Mademoiselle Ward.

Kate s’écarta pour laisser la place à Tim afin qu’il puisse réaliser les formalités de l’emprunt. Elle en profita pour demander à la responsable comme elle allait et si l’activité de la bibliothèque se portait bien. Avec les livres électroniques et internet, il est vrai que les jeunes d’aujourd’hui fréquentaient beaucoup moins ce genre d’endroit. Ce n’était pas le cas de la jeune femme qui appréciait un contact humain en dehors d’un bar ou encore d’un night-club …

Dernière édition par Kate Ward le Sam 5 Mai - 18:11, édité 1 fois

Il devait essayer. De toute son âme, même s’il savait d’ores et déjà qu’il flancherait probablement assez rapidement. Malgré toutes ses bonnes intentions, le naturel aurait tôt fait de revenir au galop ! En attendant, il devait lutter contre. Il lui serra la main, après quelques instants d’hésitation, c’était certes un geste des plus banal, mais pour lui qui n’aimait pas trop « toucher » les inconnus c’était déjà pas mal. Serrer la main était quelque chose qui était bien vu, alors il n’avait pas eu d’autres choix que de s’adapter.

- Oui, oui ça va bien, merci !

De toute manière, que cela aille ou pas, il était du genre à dire que ça allait, au moins, on lui fichait rapidement la paix sur la question ! Il n’aimait pas parler de lui et les gens étaient curieux, si une réponse au « ça va » était négative, la plupart des personnes voulaient savoir pourquoi… tandis que d’autres –comme lui-, s’en contre fichaient et continuaient la « discussion » comme si de rien n’était ! Il la suivit ensuite sans rien rajouter –quoi dire de plus de toute manière ?- jusqu’à la responsable de l’accueil qu’il salua d’un bref coup de tête. Ses bonnes résolutions semblaient déjà totalement disparu au fin fond de son esprit, car il ne savait plus quoi dire, et préférait rester un peu en retrait. Avec un peu de chance, elle dirait tout pour lui et il aurait juste à prendre libre tout en prononçant juste quelques mots, dont son nom et un « merci », un «au revoir ».

Il devait se reprendre, il devait mieux se comportement, surtout avec Kate qui avait tenu parole, et tentait de continuer à parler un minimum, à faire quelques phrases même si pour l’instant cela lui semblait compliqué ! La vérité, c’est qu’un peu trop plongé dans ses pensées, il n’écoutait qu’à moitié ce qu’elle racontait, enfin du moins jusqu’au moment où la bibliothécaire prononça le nom « Ward ». Il bugua quelques instants avant de se dire que c’était probablement une coïncidence, et de toute manière cela ne le regardait absolument qui elle était, cette demoiselle. Elle allait lui donner le bouquin et probablement que ça en finirait plus ou moins là, qu’ils ne se reverraient pas. Il n’était pas sa sœur, papoter sur tout et rien, essayer d’en savoir plus sur elle n’était pas quelque chose qui l’intéressait particulièrement. Il s’avança finalement vers la jeune afin de remplir les formalités, il donna son nom et prénom en épelant bien le tout de peur qu’elle écorche un peu son nom de famille. Il n’aimait pas le donner, non pas par ce qu’il en avait honte, mais pour les préjugés que pouvaient avoir les gens sur les Russes en général…. Comme si tout le monde était pareil, comme si lui y pouvait quelque chose de tout ce qui s’était passé. Il soupira doucement, avant de prendre son précieux (aka le livre) et de remercier la bibliothécaire. Il rangea celui-ci dans son sac avant de se tourner vers Kate et de prendre la petit clef USB qu’il avait dans la poche, il lui donna sans un mot, le rose aux joues, se sentant totalement débile de rougir pour si peu, surtout sans savoir trop quoi rajouter. Un ange passa pendant quelques instants avant qu’il arrive à se racler la gorge et à reprendre la parole

- J’ai pensé que cela pourrait t’intéresser, j’ai mis quelques ouvrages que j’avais en format numérique qui pourraient te servir pour tes études. Il inspira un bon coup, se passa une main dans les cheveux avant de continuer Et heu.. t’inquiètes pas il n’y a de virus ou quoi ! tenta-t-il de plaisanter.

Une plaisanterie, c’est bien quand c’est drôle, mais alors quand ça ne l’est pas et en plu qu’elle ait dite de façon maladroite avec un ton de personne mal à l’aise c’était juste étrange, voire inquiétant. Peut-être qu’elle allait croire qu’il avait mis quelque chose dessus, quelque chose de mauvais et qu’il essayait d’en plaisanter alors qu’il ne savait pas mentir. Pourquoi diable est-ce qu’il avait rajouté ces quelques mots ? L’explication était suffisante, pourtant et il savait que l’humour n’était pas son fort, mais elle avait déjà dû le remarquer. Il n’y avait plus qu’à espérer qu’elle le prenne réellement comme une plaisanterie et il n’y avait plus qu’à attendre pour avoir ce verdict !

Kate commençait sérieusement si le problème ne venait pas d’elle. Cela faisait déjà plusieurs personnes qu’elle rencontrait dernièrement et qui semblait mal à l’aise voir sérieusement mal dans leurs baskets. Quelque chose dans son attitude agissait-elle de la sorte sur ses interlocuteurs ? La brune n’était pas très à l’aise elle-même avec l’idée que cela puisse être vrai. Elle ne faisait pourtant rien pour s’imposer aux autres ou les gêner de par sa présence. Elle posait de simples questions qu’elle assimilait à de la courtoisie mais elle ne comptait pas vérifier la véracité des réponses. Chacun était libre de faire ce qu’il voulait après tout. Elle était bien mal placée pour imposer ses volontés à qui que ce soit autre qu’un criminel en train de faire du mal à quelqu’un.

Lorsque Keaton lui a demandé de passer du statut de serveuse à putain, sa demande était formulée d’une façon très particulière et adaptée. Le refus n’y avait pas sa place malgré le fait qu’elle n’avait que quinze ans. Evidemment, une fois qu’elle avait commencé à faire ce métier et à avoir des clients récurrents, faire machine arrière était mission impossible. Très vite, certains hommes étaient prêts à faire monter les prix pour l’avoir. C’est ainsi qu’elle avait attiré l’attention des consommateurs de la seconde catégorie, ceux qui ne venaient pas que pour le sexe. De toute évidence, frapper une jeune fille procurait beaucoup de plaisir chez certains. Rapidement, la brune eut son premier client du genre puis le deuxième. Cela ne se passa pas franchement bien. Certaines limites étaient censées être posées mais il n’en était rien. Son mac l’avait empêché d’aller à l’hôpital de peur d’attirer l’attention. C’est à ce moment-là qu’elle avait conclu que si les limites n’étaient pas respectées, elle comptait bien se barrer. Keaton avait menacé de la tuer, qu’il ne permettrait à personne d’autre de se faire du fric avec elle. Mais ça ne lui faisait pas peur de mourir à l’époque, à cet instant, la brune n’avait absolument rien à perdre.

La jeune femme sentit son œil qui la tirait légèrement. Si on lui avait dit que le premier coup qu’elle prendrait dans la rue, avant même d’avoir commencé une mission, viendrait de sa mère, elle n’y aurait jamais cru. Elle se retint de toucher son œil de peur d’attirer l’attention dessus et de virer le fond de teint qu’elle s’était faite suée à mettre. Le maquillage n’était franchement pas pour elle. Alors que la transaction venait de se finir, Kate voulait remercier de nouveau Tim pour le bouquin en l’invitant à boire un coup. Mais après le début de leur retrouvaille, elle n’était plus sûre que cela soit une bonne idée. Un mouvement de la part de son interlocuteur la sortit de ses pensées. Fallon lui avait déjà dit mainte fois que son plus grand ennemi sur le terrain allait être elle-même. Elle réfléchissait énormément au point parfois de déconnecter de la réalité. Cela faisait de la jeune femme une cible très facile à atteindre. En l’occurrence, Tim ne faisait que lui tendre une clé USB. Kate s’en saisit avant de reporter son attention sur le jeune homme qui avait de toute évidence quelque chose à lui dire, quelque chose qui ne sortait pas. Nerveux, le garçon était franchement nerveux. Elle abaissa son regard sur la fameuse clé avant de le rediriger sur Tim.

Merci c’est très gentil ! J’y jetterais un coup d’œil dès demain matin.

La brune marqua un temps de pause. Le jeune homme était de toute évidence toujours aussi embarrassé en sa présence. Elle esquissa un sourire à sa remarque sur l’absence de virus dans la clé. Il y avait plutôt intérêt en soit mais il faudrait qu’elle voit avec Fallon si elle saurait comment vérifier ça. Enfin, si sa mère revenait enfin à l’appartement. Elle ne s’inquiétait pas réellement de son confort physique, l’africaine avait beaucoup d’argent alors payer l’hôtel pendant plusieurs nuits n’était absolument pas un problème. Elle se préoccupait d’avantage de son bien-être psychologique. La jeune femme avait du mal à avoir de ses nouvelles alors la convaincre de rentrer dans leur petit cocon familial, impossible.

Dis-moi Tim, est-ce ma faute si tu es aussi gêné ou bien est-ce ta façon d’être en permanence ? Je sais je suis un peu directe, je suis désolée. Je t’avoue que pour te remercier je pensais t’inviter à boire un café mais je ne voudrais pas te mettre plus mal à l’aise que tu ne l’es déjà.

Franche ? C’était le moins que l’on puisse dire. Kate n’avait pas pour but de le gêner plus qu’il ne l’était déjà. Mais il est vrai que cette façon de faire pouvait être quitte ou double. La brune maintient un petit sourire amical à l’intention de Tim.

Pourquoi est-ce qu’il lui avait donné la clé USB finalement ? Il n’en savait trop rien, c’était peut-être une idée des plus merdiques, cela signifiait qu’ils allaient devoir se revoir pour qu’elle lui rende, même si à vrai il se fichait pas mal qu’elle la garde. Il avait juste eu envie de l’aider à son niveau, ce qui n’était pas grand-chose. Ce n’était pas un bouquin ou deux qui pourraient réellement l’aider, surtout une fois qu’elle serait sur le terrain mais au moins, pour une fois sa « collection » avait servi à quelque chose, alors cela le satisfaisait quand même un peu. Lorsqu’elle le remercia, malgré sa petite « blague » pourrie, il eut un faible sourire. Il hésita de nouveau quelques instants avant de finalement arriver à prendre la parole :

- Après, peut-être qu’ils ne vous plairont, je n’en sais trop rien. dit-il pour lui faire comprendre qu’il était également possible qu’elle s’ennuie avec !

Et bientôt elle posa une question des plus… disons gênantes même s’il comprenait que cela pouvait être troublant de se trouver face à lui et sa timidité. Il sentit le rose lui monter de nouveau aux joues et ne savait plus trop où se cacher, il la regarda quelques instants, avant de fixer de nouveau le sol se sentant un peu trop gêné pour la regarder réellement de face. Qu’est-ce qu’il pouvait bien répondre à ça ? Il avait envie d’appeler sa sœur au secours, tout en se trouvant stupide. Elle n’allait pas le manger quand même ! Ce n’était qu’un coup à boire, cela n’engageait à rien, et elle avait l’air d’avoir compris que ce n’était pas trop son truc de parler. Allez, il devait y mettre un peu du sien, il devait accepter cette « invitation ». Il devait arriver à pouvoir sortir un peu comme tout le monde. Il se passa une main dans les cheveux, avant de se mordiller la lèvre pendant quelques instants d’anxiété mais finalement, au bout de quelques nouvelles secondes, il braqua ses yeux dans les prunelles de la demoiselle, tenta un sourire avant de lui répondre :

- Heu… D’accord, merci.. Mais .. mais il ne faut pas te sentir obligée non plus. Tu ne me dois rien.

Il haussa les épaules, il ne savait pas trop si elle faisait ça par ce qu’elle en avait envie, ou juste pour être gentille en retour, alors il espérait que ces quelques mots éclairciraient les choses pour elle. Si elle n’en avait pas envie elle ne devait pas se sentir obligée. Et après un nouveau temps de silence, il reprit la parole, cette fois pour répondre au reste de sa phrase.

- Non, non, ce n’est pas toi. C’est… ça dépend, mais il y a pire.

Oui, oui des fois il pouvait être pire que maintenant, des fois il était beaucoup moins stressé, mal à l’aise et timide. Il ne savait pas trop le pourquoi du comment, ça dépendait. Yulia appelait ça le feeling, ou l’instinct. De très rares personnes arrivaient à le mettre à l’aise de suite, il ne pouvait pas expliquer pourquoi, alors qu’avec Kate par exemple, alors qu’il la trouvait gentille, qu’il voyait bien qu’elle ne semblait pas lui vouloir de mal, il avait quand même du mal à être détendu, comme si son cerveau lui disait de faire quand même attention. Lui, parano ? Totalement.

Enfin, voilà quoi, je ne suis pas spécialement sociable, c’est tout. Il ne faut pas le prendre personnellement… tu es .. heu… gentille.

Il n’était pas certain qu’une fille apprécie réellement ce compliment mais il était de toute manière trop tard pour revenir en arrière. Il la trouvait juste gentille, et gentille dans le bon sens, pas « gentille » comme certains disaient en parlant de gens un peu simples. C’était stupide d’utiliser ce mot dans ce sens-là… après les propos pouvaient être ambigus. Il inspira un bon coup avant de finalement reprendre :

Si ça tient toujours tu voudrais aller où… et quand ? Enfin, je suppose que c’est maintenant… mais ça peut aussi être plus tard. Tu as peut-être quelque chose d’autres de prévu.

Peut-être l’avait précisé dans sa réponse, mais à vrai dire il ne s’en souvenait absolument pas… ou plutôt, il avait probablement mal écouté.

La gêne de Tim était quasi-permanente. Alors qu’il avait été gentil en lui amenant des livres électroniques sur une clé USB afin de potentiellement l’aider dans ses études, le jeune homme était à deux doigts de s’excuser de son attention. Kate lui adressa un petit sourire compatissant. Evidemment, il était possible que ces livres ne soient pas si utiles ou bien qu’elle les ait déjà lu. Mais après tout, comme le disait le dicton, c’est l’intention qui compte. C’était lui au départ qui lui avait rendu un grand service et c’était à nouveau lui qui lui filait un coup de pouce. La jeune femme glissa la clé USB dans la poche de son pantalon avant de lui dire :

C’est vraiment très gentil. Je dois dire que depuis le temps j’en ai déjà lu un grand nombre mais je doute avoir fait le tour de tous les ouvrages qui existent dans le domaine.

Evidemment la question que la brune lui avait posée le mettait encore plus mal à l’aise. Elle remarqua les joues de son interlocuteur qui rosirent progressivement. Tim alternait son regard vers elle puis vers le sol. La jeune femme n’aurait peut-être pas dû être aussi directe. Mais dans un sens, elle avait sa réponse. De toute évidence, sa présence le dérangeait clairement, peu importe si cela venait d’elle ou de n’importe qui d’autre. Le problème était réel et de toute évidence, le brun en avait conscience même s’il n’arrivait pas à passer outre. Kate était sur le point de couper court à la conversation ne souhaitant pas laisser le jeune homme dans cette posture qui semblait plus qu’inconfortable. Mais ce dernier semblait ouvert au fait d’aller boire un café. En fait, il avait juste peur de s’imposer selon ses dires. La barmaid lui adressa un petit sourire compatissant. S’était-il rendu compte qu’il était passé au tutoiement ? La brune avait des doutes à ce sujet mais dans un sens elle s’en moquait, surtout si cela lui permettait d’être plus à l’aise.

Si j’ai proposé Tim c’est que cela me fait plaisir.

Le brun poursuivit sur le fait que cela ne venait pas d’elle et que sa propre réaction dépendait de la personne qui lui faisait face. De toute évidence, vivre dans ses baskets ne devait pas être une partie de plaisir au quotidien. Kate chercha à montrer qu’elle était compatissante. Elle avait cru comprendre que la proximité voir le contact physique n’était pas son fort aussi la brune allait veiller à son comportement de ce côté-ci. Le garçon poursuivit sur son côté asociable. Le petit compliment qu’il lui glissa la fit sourire. Malgré sa gêne quasi-permanente, échanger avec Tim était plutôt agréable.

Pas de soucis je comprends. Mais dans ce cas, je crois qu’il y a un café pas loin d’ici on a qu’à y aller.

Elle adressa un sourire au garçon et ils se mirent en route vers le café. Kate faisait en sorte de garder une distance raisonnable pour ne pas aggraver la situation. Le temps de boire un café allait leur permettre de se connaitre peut être un peu plus et surtout cela permettrait peut-être que Tim soit plus à l’aise en sa compagnie. Ils arrivèrent rapidement au café en question qui se situait au coin de la rue. Il y avait un peu de monde mais heureusement une table un peu à l’écart était disponible au fond de la salle. La brune fit signe de la tête au jeune homme pour qu’il la suive. Ils prirent place et la barmaid reprit la parole en attendant que l’on vienne chercher leur commande.

A part ton job d’informaticien que fais-tu d’autre dans la vie ? J’ai cru comprendre que tu lisais beaucoup et de beaucoup de domaines différents. Tu aurais quelque chose à me recommander lorsque j’aurais un peu plus de temps pour lire pour le plaisir ?

Il acquiesça doucement, il se doutait bien qu’elle avait déjà dû en lire pas mal de livres sur ce domaine, ce qui était normal vu el métier qu’elle allait exercer. Il y avait tellement de choses intéressantes à apprendre notamment grâce à des témoignages. Il n’y avait plus qu’à espérer que ceux-ci, elle ne les ait pas déjà lu, au pire de toute manière rien ce serait perdu vu qu’il ne les avait pas acheté pour elle. Il préféra ne rien répliquer sur le sujet… mais rapidement la situation dégénéra un peu de son point de vue avec les nouvelles questions. Il ne savait plus trop où se mettre ou même quoi répliquer, le pire c’est qu’il se sentait devenir rouge comme une tomate. Bravo, il allait encore passer pour un abruti un agissant comme ça, en étant aussi timide, mais c’était comme plus fort que lui, face à Kate il avait bien du mal à se comporter comme une personne « normale », enfin du moins dans la norme de la société. Il se trouvait normal, c’était juste que dès que l’on était un peu différent, sur n’importe quel détail on était montré du doigt. Stupide société. Stupide humains qu’ils étaient tous. Malgré tout il accepta l’invitation tout en continuant à agir de la même manière. Lorsqu’elle reprit la parole, assurant que cela lui faisait plaisir, il retroussa légèrement le nez, visiblement un peu sceptique. Il avait bien du mal à comprendre ce qu’il pouvait il y avoir de réjouissant dans une telle situation, pourquoi est-ce qu’elle appréciait de se farcir sa présence ?! Il y avait des mystères, et il essaya de ne pas trop penser à cette question. Il devait se contenter d’accepter des phrases comme ça, en arrêtant de tout remettre en question. Il se passa une main dans les cheveux avant de lui faire un petit sourire gêné.

- Heu… cool ?!

C’était bien comme ça qu’on disait ?! Cool, génial. Avec un peu de chance, il n’avait pas été trop à côté de la plaque cette fois-ci niveau civilité. Il essaya néanmoins de continuer à faire un semblant de conversation, histoire que le silence ne règne pas totalement entre eux, ça serait totalement contre-productif !

- Je vous suis !

Là encore, il ne savait pas franchement quoi dire d’autres ! Il n’y avait probablement pas d’autre à ajouter. Kate avait l’air bavarde, elle trouverait rapidement autre chose à dire, d’autres questions auxquelles il arriverait à répondre avec plus ou moins de facilité ! Après une courte marche pendant laquelle il avait gardé les mains dans les poches ils arrivèrent enfin à ce café. Il fit une légère grimace mais ne fit aucun commentaire et continua de suivre la jeune femme, espérant qu’ils allaient trouver une place un minimum à l’écart ! Fort heureusement il en restait une et ils s’installèrent. Il avait à peine posé ses fesses sur la chaise que déjà Kate avait repris la parole.

-A vrai dire, que je ne fais pas grand-chose, j’aime lire, puis sinon je cuisine ou je regarde la télé ce genre de choses. Ces choses qui le faisaient rester bien tranquillement chez lui Enfin, je sors quand même… surtout quand ma sœur est disponible… Il haussa les épaules avant de reprendre ca dépend tu aimes quoi comme genre de livres ? Je peux effectivement t’en recommander que quelques sujets, mais je ne sais pas si on a les mêmes goûts. C’est comme pour tous, suivant la personne un livre peut-être génial ou détestable.

Il haussa un peu les épaules. Cherchant quelque chose à répondre à tout ceci, enfin disons à continuer à trouver une ou des questions pour la faire parler, pour qu’elle ne soit pas la seule à entretenir entièrement la conversation.

- Et toi tu fais quoi ? Je suis certain que ça doit être un peu plus… disons trépident que moi.

De toute évidence, Timofey n’aimait pas être en présence d’autres personnes, y compris celles qu’ils connaissaient un peu. Kate le sentait méfiant, peu sûr de lui. En même temps, elle ne pouvait pas vraiment lui en vouloir vu le monde dans lequel ils vivaient. Ce monde était pourri de l’intérieur, elle était bien placée pour le savoir. Même si elle se montrait à l’aise à chaque occasion, son ancien métier lui avait bien appris à faire semblant, elle ne restait pas moins sur ses gardes. Et puis, habituellement, Fallon était là pour rappeler à la jeune femme qu’elle ne devait pas faire confiance à n’importe qui si ce n’est à personne. Cette dernière avait trop peur de la perdre comme elle avait trop peur de perdre sa mère. Aujourd’hui, la brune ne savait toujours pas ni où l’africaine était, ni si elle pensait revenir auprès d’elle à un moment donné. Cela faisait que quelques jours mais la barmaid avait l’impression qu’elle n’avait pas vu Fallon depuis des mois. Son quotidien lui convenait beaucoup moins en son absence. En fait, rien ne lui convenait si elle ne pouvait le partager avec sa mère adoptive.

Installés au fond de la salle, Tim commença à répondre à l’interrogation de la jeune femme. Un peu timidement au départ, il prenait de l’assurance au fur et à mesure qu’il parlait. Le garçon lui parla de son quotidien qui semblait guère différent de celui de la brune à l’exception qu’elle ne sortait pas avec sa sœur mais sa mère. Le jeune homme passa du mode serviable en étant prêt à lui conseiller des bouquins au mode « pas sûr de lui » en précisant que peut être ne serait-elle satisfaite par les livres qui correspondaient à ses goûts à lui. Kate eut un petit sourire. De toute évidence, même si son naturel revenait l’embêter, son interlocuteur tentait tant bien que mal de s’impliquer dans la conversation. La barmaid appréciait l’effort qui ne devait pas être de tout repos. Combattre sa façon d’être était une épreuve au quotidien. Elle-même tentait d’être moins curieuse ou, tout du moins, d’obtenir les réponses sans poser les questions comme dirait sa mère. Mais dans ce genre de situation, il était difficile de discuter avec un homme qui ne semblait pas apte à la conversation.

A vrai dire mon quotidien est guère différent du tien …

Kate s’interrompit pour accueillir la serveuse qui vint leur demander ce qu’ils désiraient. La jeune femme commanda un café liégeois. Elle aurait bien besoin de ça pour tenir vu les deux dernières nuits qu’elle avait passé. La brune n’avait pas aussi mal dormi depuis six ans, depuis qu’elle dormait sous le même toit que Fallon en soit. Même si elle avait eu des nouvelles par message de sa mère adoptive, la barmaid ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter et de se ronger le sang. Une fois que Tim eut commandé, la serveuse repartit dans l’autre sens et elle put reporter son attention sur le garçon.

A part les études et le boulot, ma vie est remplie de tâches ménagères. Je n’arrive même plus à prendre le temps de lire pour le plaisir. Mais j’avoue que j’aimerais bien reprendre un bon romain type policier ou fantastique pour me détendre un peu. Il est vrai que les goûts et les couleurs sont propres à chacun mais je peux très bien apprécier un livre que tu as aimé également.

La serveuse arriva avec leur commande. La jeune femme sortit un billet de son sac et lui tendit dès qu’elle eut posé les deux boissons. Elle lui sortit sa monnaie et se repartit à ses occupations. Kate posa ses mains de chaque côté du grand verre. Le chaud lui fit du bien aux mains et l’odeur venait chatouiller ses narines d’une douce odeur sucrée.

En plus de mes études pour intégrer la Police Scientifique, je suis barmaid. Et je te garantis qu’assister à des bagarres quasiment tous les soirs n’a rien de trépident.

La brune acheva sa phrase sur un petit rire. Elle commença à faire tourner sa grande cuillère dans son verre avant de la sortir pour goûter la chantilly. Comme elle s’y attendait, il s’agissait d’une chantilly industrielle, ça n’était pas mauvais en soit, mais ça ne valait pas de la chantilly faite maison. Kate prit une seconde cuillère avant de poursuivre :

Alors dis-moi, aurais tu un policier ou un roman fantastique à me conseiller ? Changer d’air en m’évadant dans un bouquin me ferait le plus grand bien je crois.

Il devait parler, même un peu ! Ce n’était quand même pas très compliqué ! Aligner deux mots c’était d’un jeu logiquement enfantin, non ? Il essaya de répondre le plus simplement possible mais en faisant des phrases assez construites. Il espérait juste que la jeune femme soit moins curieuse que sa sœur, sinon il allait devoir parler, parler et encore parler et s’il envoyait paitre sa jumelle quand bon lui semblait, il n’en sentait pas capable avec Kate. Autant il pouvait envoyer balader sans retenue aucune les inconnus, autant avec la jeune femme pour l’instant quelque chose l’en empêchait : elle était gentille et patiente avec lui, agréable même alors elle ne méritait pas de mots méchants. Il haussa un sourcil visiblement surpris lorsqu’il apprit que leur quotidien se ressemblaient d’après ce qu’elle semblait dire. Il commanda la même chose que la jeune femme et reporta son attention sur cette dernière, écoutant à présent comment se passait généralement ses journées. Il eut un vague sourire en entendant tâche ménagères.

- On passe notre temps à se fritter avec ma sœur, sur lesdites tâches ménagères ! Vu qu’on aime pas ça tous les deux… lors on a dû mal à se mettre d’accord sur qui fit quoi. Ca vous fait quand même une vie très animée, c’est normal de ne pas avoir trop de temps pour… disons les petits plaisirs, les loisirs seraient peut-être un peu plus exact.

Il se tut quelques instants, pour les livres qui plaisaient ou pas, elle avait raison, elle pouvait apprécier les livres qu’il aimait également, il ne devait pas être que dans le négatif. Bon, elle avait de la chance, niveau policier et même fantastique, il s’y connaissait un peu, voire même pas mal. Il n’était pas forcément un très grand lecteur, mais à force e livres des résumés, des avis d’être dans des groupes facebook de lecture, ça aidait grandement ! La serveuse revint alors, les boissons et remercia les deux filles.

- T’es certaine que tu ne veux pas que je paye, ma part ?

Elle était étudiante, elle avait peut-être besoin de cet argent également

- Merci en tout cas !

Les yeux posés sur la boisson, il attendait qu’elle refroidisse un peu avant de commencer à l boire histoire de ne pas trop se brûler la langue, il aimait les boissons très chaudes, mais pas bouillantes non plus. La nouvelle question de la jeune femme, lui fit hausser un peu les épaules, c’était vaste comme thèmes, il faudrait peut-être déjà définir un peu mieux ce qu’elle aimait, notamment dans le fantastique :

- Tout dépend ce que tu aimes dans chaque catégorie, par exemple, dans le policier, c’est le policier pur qui te plait, comme les livres d’Agatha Christie –excellent 10 petits nègres-, ou plus dans le thriller voire un peu gore, comme ça se fait aujourd’hui et depuis quelques décennies ? Pour le fantastique, même question, est-ce que tu aimes la bit-lit ou l’urban fantasy ; ou est-ce que tu es plus univers dystopiques fantastique (ou même pas trop fantastiques), univers avec des gens avec des pouvoirs et compagnie. Il se tut quelques instants avant de reprendre Après, je peux te conseiller avec ce que j’ai aimé, mais je préfèrerai que tu me donnes des exemples plus précis de ce que tu aimes généralement, même si découvrir de nouvelles choses ne peut pas faire de mal ! J’essayerai de te guider avec ça. Je peux juste aussi te donner une liste de livres que j’aime bien…

Oui, il venait de faire vraiment une très grande phrase, mis sur ce genre de sujet, c’était quand même plus facile pour lui de communiquer.

Kate eut un petit rire lorsque le garçon lui avoua se battre avec sa sœur pour savoir qui ferait le ménage. Elle avait pris tout à sa charge excepté la chambre de Fallon que cette dernière préférée faire elle-même. Cette semaine, c’était la première fois en six ans qu’elle s’était occupée de ranger et nettoyer la chambre de sa mère absente. Cette pensée la rendit un peu triste. Elle ne s’était jamais battue concernant les tâches ménagères car elle trouvait cela normal de le faire pour sa mère. C’était un faible prix à payer face à la liberté qu’elle lui avait offerte. La brune était surprise de voir que Tim pouvait se détendre aussi facilement. Il suffisait juste de lui laisser le temps en fait. La barmaid avait tout de même envie de rire pour une chose qui montrait que le jeune homme n’était pas encore tout à fait à l’aise : il n’arrêtait pas d’alterner le vouvoiement et le tutoiement. Hors Kate n’était pas franchement habituée à ce qu’on la vouvoie, c’était plutôt elle qui vouvoyez les clients.

Oui j’imagine la chose. Mais il est vrai que chez nous les règles se sont faites naturellement. Ma mère ne cuisine pas vraiment donc j’ai vite pris la place derrière les fourneaux.

Kate prit son verre pour boire une gorgée. La boisson était encore très chaude mais ça passait. Elle ne s’était pas brûlée avec cette gorgée pleine de gourmandises. L’odeur sucrée lui donnait envie depuis le début de boire le verre d’un coup. Mais la fumée qui s’échappait de la boisson confirmait ce qu’elle savait déjà : c’était très chaud.

Je t’en prie. Ça me fait plaisir je te devais bien ça !

Tim lui expliqua alors son point de vue sur les romans policiers et les romans fantastiques. De toute évidence, il était plutôt au courant de ce qui se faisait mais surtout, il était à l’aise avec le sujet. La brune se mit en tête de poursuivre dans le thème tant qu’elle pourrait étant donné que cela semblait convenir au garçon. Et puis, elle avait des années à rattraper. Le dernier bouquin qu’elle avait lu pour le plaisir remontait à son travail de putain sous la coupe de Keaton. Lorsqu’elle ne travaillait pas, elle s’évadait de sa vie de merde grâce aux livres et à l’imagination débordante des écrivains. Le jeune homme avait raison, si elle lui donnait des noms de livres qu’elle avait aimé qu’il connaissait également, cela lui permettrait de lui recommander des ouvrages similaires. Kate leva les yeux vers le plafond afin de réfléchir. Son dernier livre ne remontait pas à la veille aussi pour se souvenir des titres des livres ainsi que du nom des auteurs, cela n’était pas si facile. Après plusieurs secondes qui pouvaient paraître longues, la brune reporta son attention sur le garçon :

Je crois que je n’ai pas de style en particulier. C’est plus une question de réussir à se plonger dans l’univers de l’auteur. Côté policier, j’ai lu Agatha Christie mais celui que j’ai préféré jusqu’à présent c’est Le livre des morts de Cooper Glenn. C’est d’ailleurs peut être considéré en partie comme un roman fantastique. Mais je reconnais que l’on retrouve un peu de James Bond dans le personnage principal en moins charismatique et avec un passé un peu plus lourd. Sinon côté fantastique j’ai lu les collections de Harry Potter, le Seigneur des Anneaux, la Maison de la Nuit : des ouvrages plutôt basiques mais qui se lisent bien. Mais j’avoue qu’aujourd’hui je pencherais plus pour du policier je pense.

Elle accompagna ses dernières paroles d’un petit sourire. Il est vrai que vu la vocation dans laquelle elle cherchait à se lancer, il était plus enviable de partir sur ce thème pour sa prochaine lecture de loisir. Mais Kate ne savait pas du tout sur quoi s’orienter. Il y avait une multitude de livres différents, surtout dans les polars.

Oui, il savait que de se disputer avec sa sœur pour si peu c’était débile, mais après tout pourquoi pas ? De toute manière, ils n’en venaient jamais réellement aux mains, cela restait toujours beaucoup plus tendre et amical, mais il se garda bien de lui dire, il n’avait pas spécialement envie de rentrer dans ce genre de détail pour le moment. Il essayait de tenir un discours le plus cohérent possible sans se rendre compte qu’il passait du « tu » au « vous », il haussa un sourcil en entendant qu’elle faisait également la cuisine, il entendait presque sa sœur ricaner une connerie du genre « elle est bonne à marier », il ne fit aucun commentaire immédiat et la regarda plutôt boire la boisson très –trop- chaude. Finalement il reprit doucement la parole :

- Si tu le dis… Et pour les règles, au final, c’est peut-être mieux comme c’est fait chez toi, ça évite des soucis inutiles, mais bon, avec ma sœur on n’arrive pas à s’y tenir, même quand on planifie les tâches à l’avance, alors se prendre le chou sur ça, c’est probablement ce qu’on fit de mieux avant de s’y mettre vraiment ! Chacun son truc. Après, moi, j’aime bien cuisiner, c’est plus une passion, qu’une tâche … dans la plupart des cas en tout cas.

C’est-à-dire s’il était d’humeur ou pas… mais il est vrai qu’il préférait faire la popote plutôt que le ménage par exemple. Bientôt il commença à faire des phrases un peu plus longues, il voulait vraiment lui conseiller de bons livres, ou du moins des choses qui lui conviendraient, qui lui plairaient qu’elle n’ait pas l’impression de perdre son temps. La réponse de la jeune femme eut donc tendance à le déstabiliser un petit peu. Il s’attendait à un peu plus de précision, ou alors avoir un champ beaucoup plus libre. Il se concentra donc sur ce qu’elle disait, essayant de trier tout au mieux, mais ce n’était pas évident.

- Plutôt policier….Alors, voyons voir, bon Agatha Christie, mon petit chouchou c’est les dix petits nègres, même si c’est pas forcément le plus policier à proprement parler. Tu as les Frank Thilliez, les Sire Arthur Conan Doyle, avec Sherlock. J’aime beaucoup l’univers des livres de Sire Cedric, mais c’est plus thriller et fantastique celui-là… En ce moment je lis Emelie Schepp, j’aime bien, mais je n’en suis pas qu’à une centaine de pages. Sinon, tu peux aussi regarder sur internet, genre des classements des meilleurs policiers ou thrillers. Personnellement, j’essaye aussi de regarder les offres numériques, notamment des autoédités, on peut faire de belles découvertes !

Comment ça est-ce qu’il ne la conseillait pas réellement finalement ? Mais, si, en tout cas pour lui c’était des conseils, pas forcément des plus avisés d’ailleurs, mais il lui avait dit des noms d’auteurs qu’il appréciait ou qu’il connaissait de noms.

- Je ne sais pas trop, si tu en connais dans tout cela, ou pas du tout…. finit-il par dire, avant de commencer à boire la boisson, un peu gêné, il espérait ne pas avoir été un peu trop dans le hors-sujet Je… tu as quelque chose à me proposer aussi, enfin à me conseiller.

Portant son verre à ses lèvres, Kate se fit la remarque que son interlocuteur semblait se détendre petit à petit. Un léger sourire se dessina sur ses lèvres. Les deux jeunes avaient bien plus de points communs que ce qu’ils devaient probablement penser au début de leur rencontre. La barmaid ne voyait pas non plus la cuisine comme une tâche ménagère. Elle se régalait à chaque fois qu’elle essayait une nouvelle recette. Fallon n’avait jamais aimé s’embêter avec ça, pour autant, elle appréciait le temps que la brune y consacrait de toute évidence. Cette dernière se retenait toutefois sur la pâtisserie. Il lui arrivait de faire des essais de temps en temps mais sa mère lui glissait toujours une remarque concernant le fait qu’elle n’allait plus pouvoir bouger si elle continuait à manger les plats que lui préparait sa fille.

Après chacun s’organise comme il veut. Il est vrai que j’aime beaucoup cuisiner également. Il y a tellement de possibilités. J’ai toutefois encore du mal avec la cuisson des différents poissons. Il faut être très précis pour obtenir la bonne saveur.

La brune prit sa cuillère et commença à mélanger son café liégeois. Malgré la chantilly industrielle, la boisson en elle-même n’était pas mauvaise. Le liquide chaud était à la fois amer et sucré. La jeune femme écouta attentivement les recommandations de Tim. Cependant, il est vrai que les livres qu’il lui proposait étaient des grands classiques sur lesquels elle s’était déjà penchée. Même si Agatha Christie avait un style bien à elle qui plongeait le lecteur au plus profond de son histoire, elle était une des rares du siècle précédent à avoir retenu son attention. Le nom d’Emelie Schepp attira son attention. Elle n’en avait jamais entendu parler.

Je dois dire qu’Agatha Christie est l’une des rares auteures du siècle dernier à avoir retenu mon attention. J’avoue ne pas connaitre Emelie Schepp, je me renseignerais pour voir. Mais tu as raison je devrais regarder les derniers best-sellers qui sont sortis. Tu en as lu certains ?

Bien que Tim ne l’orientait pas franchement sur un ouvrage en particulier, il lui donnait quelques idées pour orienter ses recherches ce qui était déjà pas mal. Plus ils échangeaient sur ce point et plus la brune avait hâte d’avoir passé le concours pour avoir plus de temps pour des moments de détente avec un bon bouquin. S’évader et laisser ses pensées aller là où le vent les portait lui avaient toujours fait du bien même à l’époque où elle travaillait pour Keaton, surtout à cette époque. Kate pouvait ainsi rêver d’une autre vie, une vie un peu moins pourrie.

Je t’avoue que n’ayant pas lu pour le plaisir depuis quelques années, je n’ai pas franchement de nom qui me vienne d’auteur ou de livre. Actuellement je serais plus apte à échanger sur des recettes de cuisine que sur des titres de livres sympas.

La brune échappa un petit rire à sa dernière remarque. Elle était loin d’être une experte en cuisine mais étant donné qu’elle n’avait pas lu de roman depuis six ans, depuis qu’elle avait emménagé avec Fallon et décidé de faire des études, elle ne se rappelait pas énormément de ses lectures de l’époque.

Et sinon tu as dit aimer regarder la télé. As-tu des programmes préférés ou bien regardes-tu plutôt des films et des séries ?

Kate m'était souvent la télévision en fond pour cuisiner. Enfin, elle lançait plutôt un fichier obtenu illégalement pour regarder quelque chose qui l'intéressait. Les programmes diffusés à la télévision aujourd'hui ne l'intéressaient guère. Sa mère touchant un peu à l'informatique, elle lui avait appris deux-trois choses pour télécharger sans trop laisser de traces ou d'indices exploitables.

Il eut un vague petit sourire assez rapide lorsqu’elle parla de cuisson des poissons, effectivement ce n’était pas forcément le plus simple ! Mais lui était plus branché desserts sucrés de toute façon, même s’il ne se débrouillait pas trop mal dans les plats qu’il faisait à la petite maisonnée. Après avoir acquiescé brièvement, il ne tarda pas à répondre, un peu plus rapidement que d’habitude, il n’était pas toujours très à l’aise, mais c’était quand « moins pire » qu’au commencement ! Il haussa un peu les épaules et se lança :

Je suis plus sucré personnellement, et le poisson, je cuisine surtout tout ce qui est saumon, au four, ou même pas cuit, dans le genre des sushis tu vois ?! Après, je regarde pas mal tout ce que l’on peut trouver sur internet, je regarde plusieurs sites, pour voir ce qui diffère, ou ce qui est la même chose pour me faire mon petit mixte ! Il se tut quelques instants avant de reprendre Je crois que je n’ai jamais empoisonné ma sœur, ça veut dire que c’était au moins potable !

Et après avoir bu quelques gorgées de la boisson chaude, il essaya de la conseiller dans quelques bouquins mais il est vrai qu’il avait surtout l’impression d’être plus brouillon qu’autre chose dans ses dires, heureusement qu’il parlait de choses quand même relativement simples ! Il ne fallait pas non plus qu’il cite trop de noms d’auteurs, cela pourrait être un peu confus.

- J’évite d’acheter tout ce qui est trop à la mode, on en parle trop, et puis quand ça sort, ils sont chers… je préfère attendre un peu, surtout qu’il y a de quoi de faire niveau lecture, je ne risque pas d’être en manque un jour ! tenta-t-il de plaisanter. Mais oui, je suis d’accord avec toi, Agatha Christie, c’est vraiment une pointure quand on aime ce genre de livres, bien que certains trouvent que ses héros principaux, Poirot & Marple sont un peu désuets et que c’est un peu mou. Je ne suis pas spécialement d’accord avec ça, même s voit que les livres prennent de l’âge… après c’est sa façon d’écrire où on laisse place surtout à l’enquête plutôt qu’à de la réelle action pour moi, mais chacun à son avis là-dessus.

Il haussa les épaules, après tout il fallait de tout pour faire un monde, c’était bien connu. Il n’y avait plus que Kate découvre ce qu’il avait proposé, qu’elle lise pour se faire son propre avis. Il fut néanmoins assez surpris qu’elle n’ait pas lu réellement pour le plaisir depuis plusieurs années. Il comprenait bien que son temps était précieux et qu’elle ne pouvait pas se multiplier mais quand même !

- C’est dommage, tu n’as vraiment pas de temps libre, ou c’est par ce que tu préfères, faire autre chose ?

Tout le monde n’était pas comme lui, si réservé, préférant rester à l’intérieur et seul, Kate était pétillante, alors elle devait avoir pas mal d’amis, peut-être qu’elle sortait assez régulièrement avec ces derniers, cela ne l’étonnerait guère ! Kate changea finalement de sujet, fort heureusement, car lui ne savait pas franchement quoi rajouter, il se sentait presque fatigué de parler autant, ou du moins d’essayer de mener une conversation à peu près normale. Le sujet de la Tv, comme des livres était simple, mais peut-être quand même moins attrayant pour le garçon. Il se passa une main dans les cheveux, cherchant visiblement les phrases les plus appropriées.

Je mets souvent la télé en fond, et je zappe pas mal… après je regarde des émissions culinaires, des trucs un peu plus débile, où tu peux te poser et débrancher ton cerveau … sans non plus regarder de la télé réalité. J’aime bien de vieilles séries qui passent sur certaines chaines. Je crois que je ne suis pas trop film, sauf de temps en temps avec ma sœur, je trouve le format des séries plus intéressant, par ce que l’on peut voir l’évolution des persos…. Et c’est aussi plus court qu’un film. C’est plus pratique. Et toi ? Il y a des séries que tu suis et que tu apprécies ? Et tu… regardes quel genre de trucs ?

Voilà, plein de questions, comme ça avec un peu de chance, il n’aurait plus trop à ouvrir la bouche pendant plusieurs minutes.

Ecoutant son interlocuteur, Kate prit son verre afin de boire une nouvelle gorgée. Le souci avec ce type de boisson, c’est qu’il n’y en avait jamais assez. Cela se buvait tellement facilement et rapidement qu’il était difficile de ne pas prendre un second verre. Le sucré appelle toujours plus de sucré, c’est bien connu. Rien que d’en parler ou d’y penser, cela donnait envie. Tim lui avoua préférer cuisiner la pâtisserie d’ailleurs. La brune préférait éviter, non pas qu’elle n’aimait pas, mais au contraire Fallon et elle pouvaient être bien gourmandes. Elles ne tenaient ni l’une ni l’autre à avoir des poignées d’amour qui pourraient les gêner dans leur métier de la nuit.

Le poisson cru on adore aussi à la maison. En sushi, sashimi ou en tartare, c’est excellent.

Lorsqu’elle écouta la remarque du jeune homme concernant le fait qu’il n’avait toujours pas empoisonné sa sœur, la barmaid ne put s’empêcher de rigoler. Touillant le fond de son verre à l’aide de sa grande cuillère, la brune ajouta :

Bienvenue au club alors on est deux à ne pas avoir empoisonné notre entourage avec notre cuisine.

Tim reprit la parole concernant les livres. De toute évidence, il n’était pas fan des blockbusters ou autres livres hyper connus dans le monde. La jeune femme pouvait aimer ce genre de livre tant que l’histoire était intrigante. Kate avait appris à apprécier les livres pour l’imaginaire que cela pouvait apporter. D’un autre côté, n’ayant pas réellement vécue son enfance comme une petite fille ordinaire, la brunette avait vécu à travers les romans qui lui laissaient croire qu’il y avait toujours quelqu’un pour sauver les gens dans le besoin. Elle n’aurait jamais pensé que Fallon serait cette personne pour elle lorsqu’elle l’avait vu la première fois en face d’elle après avoir tiré sur l’homme qui était en train de la frapper l’éclaboussant ainsi du sang de cet énergumène.

Ce que j’aime chez Agatha Christie en effet c’est plus l’intrigue à proprement parler. Je n’aurais pas lu son œuvre pour l’action.

Kate eut un léger petit rire après sa remarque. Elle était tout à fait d’accord avec Tim sur le fait qu’on ne lisait pas ces œuvres pour avoir de l’action sans arrêt mais bien pour la réflexion, l’intrigue et la manière de penser du héros et des autres personnages. Le jeune homme se passa à nouveau la main dans les cheveux. Depuis leur rencontre, il avait fait ce geste un bon nombre de fois et la jeune femme avait l’impression que ce tic traduisait son état de nervosité ou d’inconfort. Le brun se mit à expliquer qu’il regardait la télé plus pour avoir un bruit de fond rassurant plutôt que pour suivre le programme réellement. Contrairement à lui, Kate aimait regarder des films, surtout en compagnie de Fallon. Elles avaient déjà passé plusieurs soirées devant l’écran rien que toutes les deux. Mais d’un autre côté, effectivement, il fallait prendre plus de temps pour regarder un film qu’un épisode de série.

Je t’avoue qu’entre les études et le travail, il ne me reste guère de temps. Le plus clair de ce temps, je le passe avec ma mère je crois ou à faire le ménage.

Kate ne comptait pas s’étaler sur les activités qu’elle pratiquait avec l’africaine. Entre leur soirée entre filles et les entraînements que Fallon lui faisait faire. Mais la brune n’allait pas dire à la première personne qui venait que sa mère était une tueuse à gage et qu’elle aspirait à en faire de même. La première personne venue ? Non en fait elle le dirait honnêtement à personne. La barmaid ne risquerait la vie de sa mère pour rien au monde après tout.

Je suis plus film en général. Quitte à me poser et à prendre du temps pour moi je préfère regarder une histoire entière si tu vois ce que je veux dire. Après si tu as des séries avec des épisodes assez courts, genre une vingtaine de minutes. Ca me permettrait de regarder pendant ma pause du midi, histoire de faire une vraie pause.

Dernière édition par Kate Ward le Lun 7 Mai - 20:21, édité 1 fois

Au moins sur ce point-là, ils avaient un point commun ! Le poisson cru était super bon. Il adorait aussi le poisson juste cuit dans du jus de citron, ça changeait un peu le coup et c’était également appréciable ! Mais bon, de toute manière, ils ne pourraient pas parler pendant plus de temps que cela du saumon ; par ce qu’à part cru, mi cuit et cuit, il n’existait pas vraiment d’autres styles de cuisson. Alors il allait encore devoir improviser un peu. Il se concentra quelques instants, histoire de continuer à faire des phrases un minimum intéressantes, mais vraiment un minimum.

- J’aime bien changer quand même le mode de cuisson, ce qui est bien avec ce poisson c’est qu’il y a tellement de façon de le cuisiner, ce que tu as dit. On peut rajouter cuit avec le jus de citron, ou juste grillé, en papillote, au four à la poêle… au four j’aime bien le faire avec un peu de fromage blanc et de moutarde, ça donne un goût assez sympa ! Et puis c’est aussi rapide à faire, bien quand on a pas trop de temps ! Il eut un bref rictus qui était censé faire penser à un sourire, et il ne tarda pas à ajouter Bon, après, il ne faut jamais dire jamais…. C’est vite arriver, notamment avec ce qui est périssable…

Le garçon avait finalement continué à parler de bouquins, en expliquant qu’il préférait éviter tout ce qui était à la mode, à force d’entendre les gens encensés tel ou tel bouquin il n’avait plus envie de l’ouvrir. Il préférait attendre un peu –beaucoup- avant de le lire ! Il n’était toujours pas très bavard mais au moins il était un peu moins coincé, avec la lecture, il était dans un domaine qu’il appréciait réellement et où il ne pouvait pas faire d’erreur vu qu’il parlait simplement de goût.

- Malheureusement, certains ne sont pas de ton avis, ils lisent ce genre de livre pour l’action et après trouve ça nul… en même temps s’ils savaient bien choisir leurs ouvrages, ça leur éviterait des déceptions. C’est facile de critiquer alors qu’on aime pas forcément ce genre d’œuvre au repas. C’est comme allez dans un restaurant ou chez des amis, avoir une multitude de choix, et prendre pile le plat où on aime pas l’ingrédient principal. C’est stupide et pathétique, un peu comme le monde aujourd’hui.

Oh. Stop. Stop. Stop Timmy ! Il ne devait absolument pas refaire le faire avec Kate. Il devait s’arrêter et garder pour lui -ou pour sa sœur, au choix-, ses couplets sur le monde d’aujourd’hui, d’hier et de demain, où l’on pourrait probablement ressentir le dégout de l’être humain, quel qu’il soit. Désillusion, totale. Il avait néanmoins continué avec le sujet de la télé, où au final, il avait quand même beaucoup moins de choses à dire d’intéressant. C’était plus un passe-temps quand il était trop crevé pour faire autre chose, qu’il n’avait pas envie de réfléchir et de s’abrutir, exception faite de quelques séries. Il acquiesça doucement, il comprenait tout à fait qu’elle ne devait pas avoir beaucoup de temps pour elle avec toutes ses activités, sa vie avait l’air d’être bien rythmée, mais en même temps, elle semblait avoir peu de temps pour elle réellement et c’était dommage.

- Et du coup tu ne sors jamais avec des… heu, amis ? Copains-copaines ?!

Il n’avait pas pu s’empêcher de demander cela avant de se dire qu’il avait vraiment été trop curieux et qu’Yulia avait vraiment une influence néfaste sur lui ? Probablement que ses joues s’empourprèrent légèrement, et encore une fois il se passa une main dans les cheveux, il allait vraiment devoir travailler ça aussi, mais c’était toujours mieux que de se grignoter les ongles de stress, n’est-ce pas ? Il se racla la gorge, avant de bafouiller

- Pardon, ça ne me regarde pas.

Si pour beaucoup c’était probablement qu’une simple question, quelque chose de normal, pour lui c’était entrer un peu trop dans son intimité.

- Je… heu… pour les épisodes courts, tu as Vicious. Tu as mal d’anciennes séries qui ont ce genre de formats, mais parfois elles vieillissent quand même pas très bien, tout dépend ce que tu aimes.

Il avait bu une gorgée de sa boisson, avant de reprendre la parole pour lui citer quelques séries courtes un peu plus contemporaine, mais le malaise il le ressentait toujours. Diable, pourquoi est-ce qu’il était allé lui demander ça, il pouvait être stupide parfois.

Plus le temps passait et plus la jeune femme avait la curieuse impression que son interlocuteur faisait de gros efforts pour assurer cette conversation des plus banales. Elle qui n’avait jamais eu de mal à échanger avec qui que ce soit, même au plus profond de son intimité physique, la brune avait du mal à comprendre cette gêne qui, de toute évidence, hantait en permanence Tim. Sa nervosité et son manque d’aisance se traduisaient principalement par son attitude mais également par ses phrases longues qui contenaient parfois des précisions qui ne semblaient pas coller au personnage.

Il est vrai que parfois les dates de péremption peuvent être trompeuses.

Continuant de remuer sa boisson doucement à l’aide de sa grande cuillère, Kate continuait d’observer sa nouvelle rencontre. Le jeune homme semblait très méfiant mais également très gentil. Malgré ce que la majorité des gens pensait, cela n’était pas du tout incompatible. La crainte des autres n’était pas un trait de caractère annulant tous les autres après tout. Il est vrai toutefois qu’il fallait savoir faire preuve d’un peu plus de délicatesse avec ces personnes là pour les mettre en confiance. La barmaid était loin d’avoir la confiance de Tim. Pour autant, ils avaient réussi à instaurer un climat dans lequel il arrivait à s’exprimer. Lorsque le garçon exprima sa pensée sur le monde actuel à haute voix, il y eu un léger blanc pendant lequel la brune cherchait à comprendre ce qui l’avait fait aller si loin. Lorsqu’elle crut comprendre qu’il avait juste parlé avec honnêteté, la barmaid rigola d’un rire gentil et sincère.

Je ne peux pas franchement t’en vouloir de penser ainsi. Malheureusement il y a une grande part de vérité dans ce que tu dis mais bon, peut-être que l’avenir sera meilleur, qui sait ...

Comment une ancienne prostituée sortie du système uniquement grâce à une tueuse à gage pourrait contredire le fait que ce monde était pourri ? Kate était bien consciente de la réalité des choses. Le lieutenant Hart lui avait assez rappelé en lui faisant comprendre qu’elle faisait partie des gens qui pouvaient aider les choses à changer. Mais en était seulement capable ? Sa mère aurait préféré qu’elle vive une vie paisible loin des combats de cette réalité qui ne cessent d’augmenter et de s’intensifier jour après jour. Mais la brune avait fait le choix inverse, le choix opposé. Elle avait décidé d’affronter cette réalité en essayant de l’améliorer, à sa hauteur, de jour comme de nuit. Mais plus la barmaid se rapprochait de l’échéance tant attendue, moins elle était certaine de ses capacités à réussir tout cela. Entre le concours qui était réputé pour être dur et avec un grand nombre de candidats potentiels par rapport au numerus clausus et le fait qu’elle n’avait même pas été fichu d’esquiver un coup de poing en temps réel, la brune doutait. Tim la sortit de ses pensées en lui posant une question à laquelle elle ne s’attendait pas. En soit la réponse était simple, efficace et sans malaise.

J’avoue qu’avec mon emploi du temps assez chargé je n’ai pas franchement le temps et comme personne ne me réclame pour ce type d’activité, en soit ça m’arrange. Et ne t’excuse pas, si je ne souhaite pas répondre à une question je te le dirais tout simplement. Evidemment tu peux en faire autant en refusant de répondre à une de mes questions.

Clairement, Kate venait de lui dire qu’elle n’avait pas réellement d’amis avec qui sortir et cela lui convenait parfaitement. Trop d’hommes venaient lui parler pour la mettre dans leurs lits tandis que les femmes la jalousaient rapidement. Elle avait accompagné sa dernière remarque d’un petit clin d’oeil un peu pour dire “cool Raoul”. Le jeune homme n’avait pas braqué un flingue sur sa tempe en lui posant cette question. Ils se connaissaient à peine, ils ne pouvaient donc pas jauger les limites de l’autre si aisément.

C’est vrai que les histoires faites il y a quelques années peuvent être sympas mais les images ne vendent pas du rêve. Enfin je verrais bien il faudra que je me trouve quelque chose un jour.

Kate prit son verre et le termina. Louchant sur celui de son voisin, elle vit qu’il avait presque terminé également. Aussi, elle fit signe à la serveuse de venir. Une fois à l’heure table, elle lui demanda de leur resservir la même chose une fois qu’elle avait eu un signe de Tim de la tête confirmant que cela le tentait. Cette dernière partit alors afin de préparer leur commande.

Quel est le programme du reste de ta journée ?

La brune avait songé un instant à demander à son interlocuteur s’il pensait réussir à survivre et à protéger sa soeur dans ce monde de fous. Mais cela revenait au même que de demander s’il tenait vraiment à sa soeur, une menace latente. Hors le but de la barmaid s’était rabattue sur une question plus bateau, plus soft. Ils se connaissaient depuis peu et elle avait l’impression qu’elle arrivait tout de même à lui faire passer un bon moment en remerciement du prêt du livre. Elle avait hâte de voir les ouvrages qu’il lui avait mis sur cette petit clé usb.

Il eut un vague sourire avant d’acquiescer doucement, content qu’elle soit d’accord avec lui. Il hésita quelques instants à reprendre la parole, ne sachant pas trop quoi répliquer qui ne serait pas stupide, mais finalement, avec un peu de labeur, il ouvrit la bouche !

- Je m’en méfie, mais des fois c’est aussi le conditionnement qui pose souci, notamment avec le souci de la rupture de la chaine du froid, mais malheureusement, on n’est pas dans les aliments, alors faut bien tester pour savoir, et si ce n’est pas bon, malheureusement jeter !

Au prix de cout de la vie aujourd’hui c’était quelque chose qui lui faisait toujours deuil, mais se rendre malade pour quelques bouchées était quand même quelque chose de pire, non ? Alors il fallait faire attention à l’odeur, la couleur et le goût et c’est probablement pour cela qu’il n’avait jamais été réellement malade à cause de la bouffe. Il se passa une main dans les cheveux avant de partir dans une embarquée…. Trop philosophie et personnelle, et il regretta presque aussitôt de l’avoir autant ouvert ! Sérieusement, elle n’avait pas besoin de savoir des choses de ce genre là sur lui, c’était déjà assez difficile de faire connaissance, si en plus elle le voyait comme un pessimiste, narquois, sarcastique, elle aurait probablement envie de prendre les jambes à son cou. Il devait se calmer, mais ce n’était pas simple, par ce qu’au final, il ne faisait dire que ce qu’il pensait, n’en déplaise au reste du monde. Heureusement –même si au final, il n’était pas certain que cela soit le mot le plus approprié-, elle se mit à rire plutôt qu’à prendre la fuite. Sa réplique lui fit hausser un sourcil un peu –beaucoup septique-. Non, cela ne s’arrangerait pas, ça irait de mal en pis… surtout pour les gens comme lui. Les gens devenaient de plus en plus intolérants, pour Tim plus le temps passait plus les gens devenaient dingues. C’était un point de non-retour qui était passé depuis fort longtemps ! Est-ce qu’il pouvait lui dire ça de cette manière ? Non, pas maintenant du moins.

- On verra bien, mais j’en doute personnellement, m’enfin, j’espère je tromper, on ne peut pas dire ce que l’avenir nous réserve, n’est-ce pas ?

Il tenta de lui faire un sourire comme pour faire passer la pilule, il avait essayé de rester diplomate et pas trop pessimiste ou quelque chose dans ce genre-là, mais il avait l’impression de ne pas avoir forcément très bien réussi ! Il verrait probablement à sa réaction, mais elle avait l’air d’être le genre de personne à respecter les choix des autres.
Il avait donc essayé de passer à autre chose, mais encore une fois, il mit les pieds dans le plat avec une formulation qui lui paraissait non seulement maladroite mais en plus beaucoup trop intrusive ! Vraiment, faire la conversation avec les gens ce n’était pas quelque chose que tout le monde pouvait faire ! Lui n’était pas doué dans ça, mais il n’aimait pas ça, il en connaissait qui n’étaient pas doués et qui pourtant parlaient beaucoup trop. Là encore, assez étrangement, elle répondit à la question…

- Oui, oui évidemment, mais je n’aime pas poser de genre de questions… indiscrètes… même si tu peux ne pas y répondre c’est tout. dit-il en faisant une légère grimace. Et je comprends pour les avis, mais, tu sais, c’est bien de se changer les idées parfois, pour ne pas faire un genre de surmenage, pour se déconnecter ! Enfin, après c’ta vie.

C’était bien l’hôpital qui se foutait de la charité. Mais bon, c’était plus fort que lui, et la mauvaise foi le connaissait quand même bien ! Il fut surpris de voir que la jeune femme souhaitait continuer cette laborieuse conversation. Elle qui n’avait pas beaucoup de temps, pourquoi est-ce qu’elle s’acharnait alors qu’elle devait avoir bien mieux à faire qu’à s’ennuyer avec lui ? Il ne comprenait pas, vraiment pas, mais il fit quand même signe à la serveuse qu’il reprendrait également la même chose. La question sui suivit le déstabilisa un peu, il hésita quelques instants sur la réponse à fournir, par ce qu’au final il n’en savait rien. Il haussa un peu les épaules avant de répliquer.

- Je ne sais pas, probablement aller faire les courses et après attendre ma sœur pour savoir ce qu’on fait de la soirée, rien de bien folichon en somme. Mais personnellement, ça me plait bien. Il se tut quelques instants avant de continuer Tu ne devrais pas retourner bosser, ou te reposer, ou te divertir… enfin, faire un truc plus intéressant que bavarder avec moi ?!

Diplomatie zéro, mais il n’avait pas pu s’en empêcher, il n’aimait pas ne pas comprendre. Il voulait savoir. Bien sûr, il avait dit cela sous la forme d’une réelle question, d’une voix tranquille… il espérait seulement qu’elle ne prendrait pas ça pour une quelconque agression.

Cela faisait déjà un petit moment que les deux jeunes discutaient de sujets plutôt banales. Tim semblait s’être décontracté bien que, selon les sujets, son stress pouvait reprendre de plus belle. Vu le métier qu’il faisait, cela n’était probablement pas gênant, mais Kate n’aurait pas pu faire son métier actuel et encore moins son ancien métier si elle avait été comme lui. Dans un sens, elle l’enviait presque de repousser les gens par son attitude. C’était une défense qui fonctionnait bien en règle générale. La brune aurait aimé pouvoir agir ainsi mais ce n’était pas dans sa nature et puis, dans le fond, elle n’était pas certaine que cela aurait marché pour elle aussi bien que pour l’informaticien. Ecoutant ses propos, elle acquiesça simplement d’un signe de tête. Il n’y avait pas matière à ajouter quoi que ce soit. Pour autant, elle était assez du même avis que Tim. La jeune femme n’aimait pas le gaspillage, mais à quoi bon manger une chose qui va probablement être vomi derrière du fait de son avarie ? A part se rendre malade, personne n’avait rien à y gagner.

Poursuivant sur un sujet un peu plus sensible, Timofey n’était pas très optimiste sur l’avenir de ce monde. Il était difficile de lui reprocher son point de vue. Déjà que ce n’était pas dans les habitudes de la brune, mais en plus elle penchait de plus en plus pour l’avis du jeune homme. Rien ne laissait présager une évolution bénéfique dans le futur. Tim avait raison, on ne pouvait présager de rien. Mais la réalité rattrapait chacun d’entre eux au grand galop. Kate voulait aider aux changements, tant de manière officielle qu’officieuse. Mais allait-elle faire la différence rien qu’un peu pour redonner de l’espoir aux gens ? La barmaid commença à penser de nouveau aux paroles du lieutenant Hart de la veille. Peut-être, inconsciemment, c’était elle mis tout ce poids sur les épaules. Rien n’était moins sûr que le lieu où la mènera ses choix. Le concours d’entrée de la Police Scientifique allait être déterminant dans son évolution future. Rien que d’y penser, la brune sentit de nouveau cette immense pression que Christopher lui avait mis avec ses belles paroles.

Non il est vrai qu'on ne peut jurer de rien concernant l'avenir. Malheureusement je suis assez d'avis que le monde actuel est trop pourri pour s'améliorer sans changement drastique.

L'attitude de Timofey changea du tout au tout redevenait ce garçon incertain. Il est gêné par sa propre question. Aussi la jeune femme ne put s'empêcher de rire doucement. Il poursuivit sur le besoin de déconnecter, de changer d'air. Le jeune homme avait totalement raison à ce sujet. Les séances d'entraînement avec Fallon l'aidaient beaucoup à ce niveau là. Mais il était vrai qu'à part la cuisine et les séances de combat avec sa mère, elle ne variait pas franchement les plaisirs. Plongée dans ses études, elle travaillait d'arrache pied pour réussir haut la main les examens d'entrées. Tim lui raconta alors la suite de sa journée, quelque chose de très bateau, comme pour elle. Puis il lui demanda clairement ce qu'elle foutait encore ici avec lui. Kate eut un petit sourire.

Et bien justement, je me déconnecte un peu là. J’ai guère de temps pour faire plus à vrai dire. Ca ira mieux lorsque le concours sera passé. Mais tu devrais arrêter de douter de toi. A moins que cette conversation ne te fasse suer ?

En lui faisant cette remarque, la brune lui adressa un joli sourire qui voulait dire “et toi pourquoi t’es resté ?”.

Se taire, faire attention à ce qu’il disait, c’était vraiment important et pourtant … pourtant il avait bien du mal à se montrer un tant soit peu optimiste sur le futur, c’était plus fort que lui. Il avait néanmoins réussi, au prix d’un gros effort, à être un peu plus neutre, ou diplomate dans ses propos bien qu’il y ait encore beaucoup à travailler là-dessus. Il était mécontent de lui, mais il était de toute manière trop tard pour revenir en arrière, alors bon ! Il n’avait plus qu’à se concentrer sur la réponse de la jeune femme afin de continuer à essayer de ne pas trop diverger, de ne pas dire réellement le fond de sa pensée. Il acquiesça doucement à ce qu’elle dit, heureusement, elle n’était pas des plus optimistes non plus sur l’avenir la petite Kate. Il hésita quelques instants sur la façon de répliquer et surtout quoi dire. Il ne devait pas se foirer, mais en même temps, ce qu’elle avait dit l’interpellait et l’intriguait fortement.

- Changer de façon drastique, c’est-à-dire ? Qu’est-ce que cela signifie réellement pour toi ? Enfin, je ne veux dire, que c’est assez vague, et même on va dire que s’il y avait du ménage de fait, les politiciens, sont tous des pourris, menteurs qui ne pensent qu’à leurs intérêts. Le monde retomberait vite dans ses travers, j’en suis certain.

Bravo Tim, niveau optimisme et diplomatie et compagnie, c’était franchement mal parti. Il ne pouvait s’empêchait d’être sarcastique à souhait, et pourtant, ce que disait la jeune femme était quand même assez sensé ! Il se tut quelques instants avant de reprendre :

- Enfin, en soit, un changement drastique, ne pourrait pas faire de mal, tu as raison.

Il espérait ainsi que ce qu’il avait dit juste avant passerait mieux ! Déjà qu’il se sentait mal à l’aise avec ce sujet, pourquoi est-ce qu’il avait fallu qu’il embraye sur quelque chose d’encore plus gênant ?! Il essayait quand même d’en savoir un peu plus sur elle, pour la comprendre, pour tenter de la connaître un peu plus. Yulia serait contente, peut-être….
Lorsqu’elle reprit la parole, et notamment le moment où elle lui dit d’arrêter de douter de lui, il retroussa un peu le nez, pas franchement d’accord avec elle, ce n’était pas du doute, juste une réalité. Il y avait les gens intéressants, ceux qui savent bien parler et les autres, il faisait partie des autres et cela lui convenait plutôt bien.

- Non… non, cette conversation ne me fait pas … heu… suer. Ce… Ce n’est pas ce que je voulais dire. C’est que… je… je pensais que tu avais probablement des choses plus intéressantes à faire, C’tout. Il se tut quelques instants avant de reprendre, enfin du moins d‘essayer Enfin, je sais que je n’ai pas… disons… beaucoup de conversation, c’est une réalité. Ça ne fait pas parti de les qualités, ce n’est pas une question de doute ou autres, juste d’expérience et de ressentis personnels. M’enfin, si tu ne t’ennuies pas… c’est… c’est le principal, va-t-on ire, n’est-ce pas ? Il se racla la gorge avant de continuer, toujours un peu perturbé Tu… tu voudrais parler de quoi du coup ?

Kate écoutait attentivement le jeune homme lui exposer son point de vue sur le monde actuel. Très clairement, ce dernier ne croyait pas du tout en un avenir meilleur. Il n’avait pas tout à fait tort lorsqu’il parlait des politiciens pourris et menteurs. Si seulement il n’y avait que ça. Dans le monde souterrain de la ville, c’était non seulement les politiciens mais également les flics, les hommes d’affaires et bien d’autres qui étaient corrompus jusqu’à la moelle. L’attrait des hommes de manière générale pour l’argent et la beauté des choses n’était pas quelque chose que la barmaid pouvait comprendre ou concevoir. C’était encore moins possible lorsqu’il l’obtenait au détriment des autres. Les gens de ce monde et de cette époque étaient tellement égoïste. La brune se demandait si cela avait le cas également lors des générations précédentes.

Tu n’as pas tort. Il faudrait en réalité trouver celui ou celle qui fera enfin valoir l’intérêt commun et non son intérêt personnel. Mais j’ai dû mal à croire que cela puisse arriver prochainement ni même un jour en effet.

La jeune femme échappa un petit rire à la fin de sa phrase, un rire plutôt nerveux. Ils vivaient bel et bien dans un monde pourri. Tim ajouta être d’accord avec elle concernant le changement drastique. Elle lui adressa un sourire reconnaissant. Pour autant, le brun était potentiellement plus proche de la vérité qu’elle ne l’était. Un changement drastique pourrait faire la différence, mais qui va le faire autre qu’un énième pourri qui chercherait à se faire sa place afin d’obtenir des avantages tant convoités. Leurs nouvelles boissons leur furent servis. Kate attaqua la crème chantilly avant de commencer à remuer tranquillement sa grande cuillère dans son verre.

La réaction du garçon à ses propos précédents la fit sourire. De toute évidence, elle avait dû voir juste a minima. Tim perdait un peu pied, hésitant à presque tous les mots qu’il prononçait. Il ramena sur la table le fait qu’elle devait avoir plus intéressant à faire, plus intéressant que discuter avec lui. Les gens qui ne l’intéressaient pas se faisaient souvent pot de colle avec elle tandis que ceux qui pouvaient l’intéresser ou l’intriguer la fuyaient. La barmaid se demandait bien comment elle avait pu tomber aussi bas. Le jeune homme avait raison en soit, actuellement elle n’aurait rien de mieux à faire que de retourner travailler ses cours. Seulement, avec tout ce qu’il se passait en ce moment, la brune n’avait pas du tout la tête disponible pour travailler et réviser.

La seule chose qui m’attend actuellement c’est mes cours et j’avoue ne pas avoir une immense motivation aujourd’hui.

Kate ponctua sa phrase d’un petit sourire en coin qui signifiait “les bouquins commencent à me sortir par les yeux”. Elle repensa toutefois à la pression que le lieutenant Hart lui avait mis la veille concernant le concours de la police scientifique. Avait-il rien qu’une faible idée de son passé pourri ? Comment avait-il pu le savoir ? Lauren avait juré à la jeune femme qu’elle ne laisserait pas fuiter son ancienne situation auprès de qui que ce soit. Chassant ses pensées plutôt prise de tête qu’autre chose, elle reporta son attention sur le garçon. Ce dernier venait de lui demander de quoi elle souhaitait parler. Lui qui était plutôt mal à l’aise avec pas mal de sujets, laisser le choix à son interlocutrice n’était peut être pas la meilleure décision qu’il est pris.

Et bien, j’aimerais en savoir plus sur ce que tu fais dans la vie, ton métier au quotidien. Je dois dire que lorsque je dis être serveuse dans un bar, je n’ai pas franchement besoin d’expliquer ce que je fais. Mais l’informatique est un monde plutôt vaste. Alors dis moi, dans quel domaine travailles-tu ?

Dernière édition par Kate Ward le Dim 6 Mai - 22:11, édité 1 fois

Il fronça les sourcils lorsqu’elle reprit la parole, bien qu’il comprenait totalement ce qu’elle voulait dire, il n’était pas certain qu’elle ait raison… il la trouvait un poil trop optimiste. Mais bon, comme il ne voyait pas souvent le bon côté des choses et qu’il était peut-être parfois un peu rabat-joie, cela n’aidait pas franchement à être… disons, juste, impartial. Il haussa un peu les épaules, tout en cherchant une réponse qui serait un peu plus adaptée que ce qui lui venait en tête.

- Je pense que les gens qui ne sont pas un minimum ambitieux, ou qui n’ont pas d’attrait pour le pouvoir ne deviennent pas politicien… c’est beaucoup de travail et de responsabilité. .. pour… on pourrait un être lambda ! Il haussa les épaules avant de continuer Je doute que ça existe, il y aura toujours un problème avec les gens comme ça, je maintiens, pour moi, ça ne sont que des menteurs. Je ne sais pas ce que l’on pourrait faire pour que les choses changent réellement… même un brave type pourrait se laisser corrompre par le pouvoir, alors bon !

Il n’y avait pas vraiment d’alternative pour lui… Il faudrait probablement juste faire attention à élire le « moins pire »… mais bon cette notion était tellement suggestive, changeante que cela ne servait probablement à pas grand-chose. En parler pendant des autres n’y changerait rien de toute manière à part un énorme attentat, les choses ne changeraient pas… ou plutôt les gens dans le gouvernement. M’enfin, heureusement que les boissons ne tardèrent pas à arriver, au moins cela coupa un peu le sujet… qui était d’ailleurs probablement déjà terminé. Il avait toujours un peu de mal avec ces concepts… souvent il croyait que la conversation était terminée, alors que pas du tout, alors forcément il passait souvent pour un malotru ! Bon, malotru il l’était peut être quand même assez souvent, mais il se fichait bien de ce qu’on pensait de lui, et au moins on se tenait éloigné de lui. Au moins on avait pas tendance à vouloir lui faire d’accolade ou autre. Il détestait ces contacts physiques, ça en était phobique, inexplicable. C’était comme si le contact avec les autres était quelque chose d‘horrible, de brûlant… de malsain. Il ne savait pas l’expliquer. Il essaya de se reconcentrer sur la conversation mais ce n’était pas simple…

Mais malgré tout ses efforts, et les bonnes boissons, il perdait bien et avait bien du mal à se reprendre, il avait l’impression d‘enchainer les erreurs. Il continuait ‘essayer néanmoins, tant qu’elle n’avait pas l’air de « trop » fuir, c’était probablement l’essentiel. La réponse de la jeune femme le fit légèrement sourire.

- Je comprends, ce n’est pas forcément la chose la plus intéressante du monde de réviser, mais je ne voudrais pas être la cause d‘un quelconque retard…
Non pas qu’il pensait qu’elle allait ensuite lui rejeter la faute dessus, mais il n’aimait juste pas cette idée, c’était aussi simple que cela ! Pourquoi est-ce qu’il lui avait proposé de la laisser choisir le sujet ? Par ce qu’il n’aimait pas d‘autres choix, il n’en voyait pas d‘autres. Il n’y avait plus qu’à espérer qu’elle serait assez sympa dans ses questions ! Il eut le temps de boire une petite gorgée de sa boisson, tandis qu’elle reprenait la parole, il retroussa légèrement le nez. Bonne question, du moins pas trop mauvaise… le souci était d’y répondre clairement en un peu plus qu’une phrase. Et c’était déjà beaucoup plus compliqué pour lui.

- On travaille avec des boites diverses … et on répare, en gros leur ordis ou les logiciels sur lesquels ils bossent les bugs tout ça, à distance. En gros voilà. Et finalement, il avait fait qu’une phrase. Après, je me débrouille aussi un peu, en réparations autres, mais c’est pas forcément mon domaine de base.

Il inspira un peu, il se doutait qu’il y aurait une autre question… ou plusieurs, mais il n’avait plus envie de la relancer, il l’appréciait, sinon il ne serait jamais venu ici avec elle, mais il avait fait beaucoup plus ‘efforts qu’il ne pouvait habituellement le supporter… et surtout, au final, le café se remplissait d’un peu trop de monde à son goût, et il recommença à se dandiner sur sa chaise, n’osant pas prendre congés de manière trop abrupte auprès de la jeune femme, elle ne méritait pas ça. Plus par stress que par envie, il finit sa boisson d’un coup et tenta de trouver les mots les plus appropriés pour reprendre la parole… mais rien ne vint. Alors, il préféra attendre bien sagement la prochaine question, à moins qu’elle le libère, mais elle ne le connaissait probablement pas assez pour comprendre le « fond » du problème. Il n’y avait que Yulia pour savoir des choses comme ça, peut-être Fallon et Ollie également… Elle, elle le trouverait probablement juste plus stressé.

11 Janvier 2050

Tim continuait de parler des hommes politiques. Son point de vue était complètement compréhensif, celui de la brune variait très peu de sa version à vrai dire. Mais elle osait croire encore un tout petit peu que les choses pourraient changer dans le bon sens. Enfin oser, elle aimerait croire que cela pouvait évoluer de façon positive. Mais seul l’avenir leur dira en soit. La réflexion du jeune homme était potentiellement vraie. Tout le monde n’était pas fait pour diriger. Mais cela voulait-il dire pour autant qu’aucun dirigeant ne pouvait avoir bon fond ? Etait-ce si compliqué de résister à la pression et d’agir pour le bien commun ? En quoi le pouvoir était si séduisant au point de vivre dans l’égoïsme pur ? Tant de questions qui se bousculaient dans sa tête. Etait-ce la naïveté ou bien l’envie d’une vie meilleure qui la poussait à croire à cet espoir vain ? La première étape était de trouver la personne qui saurait prendre en compte les besoins de tout le monde. C’était un défi de taille de trouver une aiguille dans une botte de foin. Et comme le brun le disait si bien, cette personne ne resterait peut être pas propre

Tu as peut-être bien raison.

Le temps passait et la café où ils s’étaient installés se remplissait petit à petit de clients pour le service du midi. Kate sortit son téléphone portable pour avoir confirmation de l’heure avant de se hâter à finir sa boisson. Elle voyait bien assez de monde au bar comme ça sans en rajouter une couche en dehors du travail. Reportant son attention sur le garçon, il semblait différent. La brune ne savait pas trop en quoi mais son attitude avait changé. L’écoutant, elle songea à ses révisions qui l’attendaient. Il avait tort de dire qu’il en serait la cause, elle était bien assez grande pour assumer ses décisions toute seule. Prenant son verre, elle but de nouveau afin de laisser qu’un petit fond, une dernière gorgée pour la route avant de partir. Malgré son manque de motivation, la barmaid allait devoir s’y remettre. Cela faisait déjà cinq ans qu’elle travaillait à ce concours, baisser les bras avant de s’être battue n’était pas son genre. Elle s’était déjà bien trop impliquée dans cette idée, cette envie d’aider, pour abandonner dans la dernière ligne droite.

J’avoue que travailler sans cesse n’est pas forcément bon. Mais il faut savoir doser les pauses évidemment.

Elle lui souria. Ecoutant le jeune homme parler de son travail, elle observa également leur environnement. La salle grouillait de monde telles des fourmis dans une fourmillière. Reportant son attention sur Tim, la barmaid le trouvait à nouveau de plus en plus gêné ou stressé. Elle le vit prendre son verre et le boire cul-sec comme les pochtrons de son bar qui descendaient leur verre de whisky. Un peu étonnée par ce geste, la jeune femme songea qu’il s’impatientait peut être de ce rendez-vous imprévu et décida d’y mettre un terme. Terminant son propre verre, Kate attrapa sa veste et son sac et se leva.

Je crois qu’il est temps de laisser notre place. On va terminer la conversation dehors ?

Timofey acquiesça et la brune repoussa sa chaise pour se frayer un chemin jusqu’à la sortie. Une fois le trottoir et l’air du dehors atteint, elle se tourna de nouveau vers son interlocuteur, un petit sourire aux lèvres. Agitant la clé USB qu’il lui avait remis plus tôt, elle ajouta :

Je te remercie beaucoup pour ce moment. Je te tiendrais au courant par e-mail des livres que tu m’as passé. Encore merci et à bientôt si ça te tente de perdre ton temps.

Elle ponctua sa dernière phrase d’un clin d’oeil et tourna les talons pour se mettre en marche en direction de son appartement. Ce petit moment de détente lui avait fait du bien. Elle n’était pour autant pas persuadée que son avis serait partagé par Tim. Il ne l’avait pas envoyé bouler mais pour autant, le fait que ce moment lui ait fait plaisir n’était pas certain du tout. Pas certaine de son interprétation du comportement du garçon, Kate comptait bien lui envoyer un e-mail pour prendre de ses nouvelles et et lui donner son avis sur les lectures qu’il lui avait recommandé. Sortant ses écouteurs, elle lança la musique et marcha au rythme de cette dernière.

Pour une fois qu’on lui disait qu’il avait raison, il en aurait bien profité, et pourtant c’était un constat bien trop amer pour que ce soit appréciable. Il soupira doucement et se passa une main dans les cheveux avant de souffler doucement

- J’aurais pourtant bien aimé me tromper, mais ça, seul le futur pourra nous le dire !

Pour le reste, la conversation avait suivi son cours, il avait même acquiescé doucement lorsqu’elle confirma que travailler sans n’était pas bon ! Il ne savait plus quoi rajouter alors il avait préféré faire ce qu’il faisait de mieux : se taire, au moins sur ce sujet. En effet, rapidement il avait été questionné sur son travail et il avait essayé de lui expliquer ce qu’il faisait… mais en deux phrases. Il ne savait pas comment l’expliquer, et vu le monde qui commençait à affluer, ses travers reprenaient le dessus. Il aurait dû se concentrer seulement sur Kate comme il l’avait fait jusque-là, mais à vrai dire maintenant qu’il avait remarqué toutes ces personnes il n’y arrivait plus, il se stressait, s’angoissait. C’était stupide, mais plus fort que lui… alors forcément que le malaise revenait. Il en vint même à finir son verre cul sec… et la jeune femme, suite à cela, ne tarda pas à se lever. Sensée. Toujours gentille, même s’il était en train de se comporter de façon pas trop cool.

- Heu oui, si tu veux.

Il se leva à son tour, pas non plus enchanté de devoir rester dehors, dans une rue tout aussi peuplée. Elle agita alors la clé USB tandis qu’il haussait un sourcil, un peu perplexe, se demandant ce qu’elle allait bien pouvoir lui dire. Elle ne semblait pas fâchée contre lui, ce qui était déjà un bon point. Kate le remercia, et là encore, il se demanda juste si elle était polie, ou si elle avait réellement passé un bon moment, pour lui c’était plutôt la première solution, bien qu’il n’en soit pas trop certains.

- Ca marche, j’attends ton e-mail… et merci… A une autre fois.

Il secoua la tête, probablement qu’il aurait dû s’excuser de son comportement et de lui expliquer qu’il n’aimait pas en plus du reste la foule. Mais il se tut, c’était déjà assez compliqué à gérer pour lui, la jeune femme n’avait pas besoin d’en savoir plus. Elle allait le trouver encore plus bizarre, c’était déjà presque inespéré qu’elle accepte de peut-être le revoir. Il se dirigea à son tour vers son domicile, probablement que Yulia serait contente d’apprendre qu’il avait un peu papoté avec une fille. Enfin, avec sa sœur tout était possible…

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